Origine de l’écriture et citation
En Mésopotamie, vers -3300, l’écriture aurait une origine comptable et administrative, permettant de fixer des quantités de biens matériels de manière pérenne, pour contrôler les ressources.
Une des première mention de référence extérieure au document serait l’utilisation des sceaux, par exemple les fameux sceaux-cylindres, qui permettent de « signer » une transation ou de marquer un stockage. Ils représente des institutions ou des individus précis, identifiés par des combinaisons uniques de symboles.
Premiers textes littéraires
Parmi les plus anciens textes connus serait un recueil de sagesses religieuses : Les Instructions de Shuruppak (-2500 environ).Il s’agit d’une liste de conseils spirituels et moraux.
Il y a d’autres textes sous forme de listes, comme pour ordonner le monde : listes de rois, de lieux, d’animaux, etc.
L’épopée de Gilgamesh
C’est avec l’affirmation de la forme littéraire du récit que se multiplient les mentions, les références et les citations. La structuration du récit en plusieurs niveaux ou selon différents points de vue semble en effet offrir un terrain particulièrement propice au jeu des renvois et des échos textuels.
L’Épopée de Gilgamesh est l’un des plus anciens récits littéraires connus, datant d’environ 2100 avant J.-C. Elle provient de la littérature sumérienne et a été écrite en akkadien sur des tablettes d’argile vers XVIIIe – XVIIe siècle av. J.-C. Cette épopée suit les aventures du roi Gilgamesh d’Uruk, qui est à la fois un héros surhumain et un homme confronté à sa propre mortalité.
He saw the Secret, discovered the Hidden,
he brought information of (the time) before the Flood. […]
He carved on a stone stela all of his toils [Tablette 1]
Ce passage souligne l’importance accordée à la fixation du récit dans la pierre afin de lui conférer valeur, pérennité et autorité, mais aussi pour permettre qu’on s’y réfère ultérieurement. Des intentions comparables se retrouvent dans le Code de Hammurabi datant d’une période proche : gravé dans la pierre, exposé publiquement, il est conçu comme un texte de référence avant d’être recopié, évoqué ou cité.
Mise en abîme de l’audience
Find the copper tablet box,
open the … of its lock of bronze,
undo the fastening of its secret opening.
Take and read out from the lapis lazuli tablet
how Gilgamesh went through every hardship. [Tablette 1]
Dès l’ouverture de L’Épopée, le récit met en scène sa propre lecture et promet une révélation à venir. Il s’agit d’une forme d’auto-référence littéraire qui semble souligner la puissance de l’écrit : un texte capable de se désigner lui-même et de s’adresser directement à son lecteur.
Mentions lacunaires d’épisodes connus
L’épopée de Gilgamesh apparaît comme une condensation de récits antérieurs, souvent évoqués sans être pleinement développés. Ces allusions laissent entendre que l’audience connaît déjà ces épisodes et qu’une simple mention suffit à les convoquer. Ainsi, certains récits détaillant les relations entre dieux et humains ne sont pas explicitement inclus ; les interactions évoquées renvoient implicitement à une mythologie partagée.
Inclusion d’un récit plus ancien dans le récit actuel
Le récit du Déluge (Tablette XI - récit d’Utnapishtim) est explicitement un récit antérieur enchâssé au sein de L’épopée de Gilgamesh.
Un récit synthétique
L’ensemble de ces procédés (mentions elliptiques, références lacunaires, inclusion de récits plus anciens) montre que L’Épopée de Gilgamesh fonctionne davantage comme un récit synthétique que comme une somme exhaustive. Elle présuppose une audience informée, dotée d’une mémoire culturelle commune et familière des codes narratifs du mythe.
À cet égard, elle peut être rapprochée des récits homériques, qui évoquent des mythes sans les développer, ou encore de textes médiévaux faisant référence à la Bible ou aux légendes sans les expliciter entièrement.
Dans le contexte d’une culture largement orale, ce type de récit agit comme une fixation sélective d’un répertoire beaucoup plus vaste. La manière d’incorporer certains récits ou d’en évoquer d’autres de façon plus ou moins développée témoigne ainsi de la transition entre une tradition essentiellement orale et les débuts d’une stabilisation textuelle.